En ce début d’année 2023, les recherches généalogiques s’annoncent prometteuses. Après avoir passé les fêtes de fin d’année dans ma famille du Nord de la France, j’ai pu rentrer en possession des photos anciennes de mon défunt grand-père. Elles m’ont permis d’en apprendre plus sur sa famille paternelle mais ont souligné des interrogations.

Des innombrables photos que j’ai pu récupérer, on retiendra trois trésors principaux:
- L’album photo de mon grand-père lorsqu’il était en Algérie de 1954 à 1960.
- L’album photo de Bernieulles, avec de nombreux clichés sur la famille maternelle de mon grand-père.
- Une boîte dans laquelle étaient entreposés de nombreux clichés plus ou moins anciens de la famille de mon grand-père.
C’est cette dernière qui a particulièrement retenu mon attention. Dans cette simple boite de tabac, typique pour une famille de marins, on y trouve une foule de photos devant-être identifiées avec plus ou moins d’informations. Identification parfois limitée à la simple supposition en essayant de la dater ou de l’identifier, et parfois guidée par des indices laissés par mon grand-père et sa mère.
J’ai pu aussi observé que mon grand-père était un précurseur de « sauvons nos tombes« , le projet de Geneanet pour préserver les sépultures vouées à disparaitre, avec pas moins de 50 ans d’avance! En effet, parmi les clichés, j’ai pu trouver la tombe de mon arrière-grand-père et de sa mère, disparue aujourd’hui, ainsi que la tombe de mon arrière-grand-mère et de ses parents qui existe toujours, tout comme celle de mes AAAGP. Mais le plus intéressant est que ces sépultures ont été photographiées peu de temps après le décès d’un des inhumés et ceux pour chaque défunt! J’ai donc face à moi une évolution des sépultures au fil du temps qui immortalise l’amour porté par ceux encore vivants pour leurs morts. Par exemple, la tombe de Vital Merlot a été photographié trois jours après sa mort.




Dans cette boite à trésor, j’ai également pu trouver des clichés concernant la famille du père de mon grand-père, les Rémond. Famille très méconnue puisqu’à l’instar des Merlot, les quelques clichés conservés ne mentionnent pas leurs noms. Seule la physionomie a pu m’aider à en identifier certaines, dont une magnifique carte postale datant de 1914-1918 et adressée à l’époux au front. cette photo de famille la voici:

On y identifie dessus une mère avec trois enfants peu âgés, deux garçons et une fille. Il est très probable et certains qu’il s’agit de Marie Henriette Lecointe (1883-1946), mère de Maurice Rémond (1912-1963), mon AGP et de ses deux autres enfants Marie-Thérèse (1910-1976), et André (1913-1967). Certes, le petit garçon debout peut sembler plus âgé que la petite fille. Cependant il n’y a que deux ans d’écart entre les deux ainés, et il ne peut s’agir que du couple Rémond-Lecointe puisqu’ils sont les seuls à avoir cette composition de fratrie. De plus je connais tous les visages de mes autres AAGP. En outre, une photo des deux frères Rémond communiant montre une forte ressemblance avec les deux enfants de ce cliché.

Cette carte postale était donc destinée à Maurice Gustave Rémond (1882-1946), mobilisé lors de la Grande Guerre au sein du 19e ETEM puis à partir de 1917 dans le 1er régiment de zouaves. le couple se marie le 12 octobre 1907 en la mairie de Boulogne-sur-Mer. De cette union, naquirent 4 enfants. L’ainée, Marcelle Michelle (1908-1910) n’a malheureusement pas survécu et est décédée à l’âge de 2 ans. Maurice a exercé en tant que maréchal-ferrant (1907), forgeron (1926) et mécanicien. Quant à Marie Henriette elle était couturière. la famille habite successivement Boulogne (1921), Desvres (1923), Lottinghen (1926) et brièvement Lens (1929) avant de retourner sur Boulogne. Il semble que l’arrondissement desvrois semble être devenu le second foyer des époux. En 1926, Marie-Thérèse y travaille au sein des fameuses faïenceries de Desvres dirigées par la famille Fourmaintraux.



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Pourtant la vie du couple ne semble pas aller au mieux. En février 1931, une séparation est prononcée entre les deux époux, suivi d’un divorce en 1935. Les raisons de ces derniers sont encore inconnues, un prochain déplacement aux AD 62 sera l’occasion d’en apprendre plus sur ces deux jugements. Dans tous les cas, les deux ex-époux se marient de nouveau. Respectivement en 1938 pour Maurice Gustave Rémond avec Hortense Eugénie Duhamel (1891/<1946), et en 1940 pour Marie Henriette Lecointe en épousant Octave Eugène Joseph Fuzellier (1877-1956). Quant à leur fin de vie, un détail a attiré mon attention. Marie Henriette décède le 2 février 1946 à Desvres. Son ex-conjoint décède lui le 26 février de la même année dans la même commune! Simple hasard ou relation plus complexe que l’on peut l’imaginer, ce couple mérite un investissement plus complet dans leur biographie lors de mon prochain déplacement aux AD62 (je n’ai malheureusement pas pu m’y rendre cet hiver à cause des perturbations de la ligne de train Calais-Boulogne).
La tombe de Marie Henriette n’existe plus. Elle se situait au cimetière de l’Est de Boulogne, où son second mari et son fils la rejoindront quelques années plus tard. Quant à celle de Maurice Gustave, c’est le mystère le plus complet tout comme son visage. J’ai été en effet très étonné de l’absence de la famille Rémond au sein de ces archives photographiques. Là où les Merlot sont biens identifiés, annotés et sont encore présents dans la mémoire de ma grand-mère qui les a connu, les Rémond quant à eux sont absents. Probablement le signe d’un rapport différent que mon AGP entretenait avec sa famille. Il est vrai que sa disparition soudaine en 1963 à l’âge de 50 ans a laissé un vide. Mon grand-père n’avait de ce côté qu’une tante partie vivre dans le Sud de la France et un oncle dont nous n’avons jamais entendu parlé, ce qui tranche nettement avec les Merlot et les nombreux frères et sœurs et cousins.
Toutefois, un cliché a retenu mon attention depuis quelques temps. Le voici sur la droite.

Je l’avais déjà remarqué lors de mes derniers déplacements dans le Nord. C’est la seule photographie de ce format conservée dans ma famille. Les photographes mentionnés nous informent qu’elle date d’après 1911 quand Guillot et Lormier ont fusionné leurs ateliers à Boulogne. Après des échanges sur des groupes Facebook, il semblerait que le cliché date des années 1930. Les deux individus ont probablement la cinquantaine. En comparant avec une photo de 1946 (à gauche) représentant mon grand-père et ses parents à la foire, je trouve une ressemblance entre mon AGP et l’homme du portrait. Pourrait-il s’agir de son père? L’hypothèse est plaisante, mais faut-il encore une fois en avoir les preuves ou du moins les indices. Voici cependant quelques pistes de réflexion:
- selon sa fiche de matricule de 1902, Maurice Gustave Rémond mesurait 1m70, avait les cheveux; sourcils et yeux noirs; un front ordinaire; un nez fort; une bouche moyenne; un menton rond; un visage ovale. Difficile de le déduire sur un portrait d’un homme de 50 ans en noir et blanc…

- La physionomie laisse penser qu’il ne peut s’agir d’un Merlot et encore moins d’un Pourre/Paillard (famille de ma grand-mère). Mais on retrouve quelques caractéristiques physiques des Rémond: le nez, les oreilles et la forme du visage.
- Il ne peut s’agir des parents de Marie Henriette Lecointe, âgé de plus de 60 ans en 1920. Cependant, on pourrait imaginer qu’il s’agit d’un frère, Notamment Henri Lecointe (1888-1962) avec Eléonore Fourcroy (1888-?) ou Maria Stuyck (1887-?), l’une de ses deux femmes.
- Du côté Rémond, il ne peut s’agir des parents de Maurice Gustave puisqu’ils sont décédés en 1907 et 1927. Quant à ses frères et sœurs, ils sont pour la plupart décédés en bas âge sauf Julia (1886-1936) mariée à Alfred Dufeutrel (1885-?).
- S’il s’agit de Maurice Gustave, on peut imaginer que la femme à ses côtés soit Hortense Duhamel, sa seconde épouse. Étaient-ils mariés au moment de ce cliché? Se connaissaient-ils depuis la séparation avec Marie Henriette? Seul les jugements permettront d’en savoir plus et peut-être donner des noms à ses visages.
Les photographies de famille racontent parfois plus que ce qu’elles immortalisent. Même si beaucoup restent encore à identifier au sein de cette boite de tabac, elles ont également soulevé ma curiosité sur les relations au sein de ma famille, me redonnant l’envie de chercher plus d’informations sur eux au sein des archives. Cette quête des visages et lieux a permis aussi de découvrir un grand-père que je n’ai pas connu. A travers ses annotations, commentaires au dos des photos, je le découvre avec quelques-uns de ses traits de personnalité qui certainement, et un des plus beaux cadeaux que m’ont offert ces archives familiales.
